La nature l’emporte sur le luxe : la justice annule le projet de réaménagement du Golf de Saint-Gatien des Bois

En janvier 2023 les associations France Nature Environnement Normandie (FNE Normandie) et Estuaire SUD ont déposé un recours contre la délibération de la Communauté de Communes Cœur Côte Fleurie (CCCCF) autorisant la révision du PLUi et in fine le projet résidentiel et hôtelier de luxe sous couvert de réaménagement du Golf de St-Gatien des Bois. Par jugement du 17 avril 2025 le Tribunal administratif de Caen conclut à l’annulation du projet, faute d’intérêt général et d’appréhension suffisante des impacts environnementaux. Les associations requérantes saluent et se félicitent de cette décision. 

Face à cette nouvelle attaque envers l’OFB, les associations France Nature Environnement Normandie (FNE Normandie), Manche-Nature, Cotentin-Nature Qualité de Vie, la Fédération de la Manche de la Ligue des Droits de l’Homme, Respire en Val de Sée et Agissons pour le Climat Granville Terre et Mer apportent leur plein soutien.

L’insuffisance des études environnementales

Pour rappel, le site du Golf est situé à la confluence de nombreux espaces naturels riches en biodiversité[1], au premier rang desquels la forêt de St Gatien des Bois déjà malmenée au cours des siècles, et actuellement menacée par de nouveaux projets (ex : la route rétro-littorale, ou le parc photovoltaïque de l’aéroport de Deauville). Contrairement aux idées reçues, le Golf constitue un véritable écrin naturel sur lequel vivent et transitent de nombreuses espèces. Ce vaste projet résidentiel et hôtelier de luxe induisait ainsi de nombreuses atteintes à l’environnement (destruction de zones humides, perturbations d’espèces défrichement, destruction et artificialisation d’espaces naturels, diminution de la ressource en eau, etc.).

 

Dans le cadre du recours, les associations dénonçaient l’insuffisance des études environnementales menées et notamment des mesures d’évitement, de réduction et de compensation (ERC) des impacts. La séquence ERC est en effet la principale tentative de réponse aux impacts écologiques résultant de certains projets. Il s’agit d’un des principes fondamentaux du droit porté par l’article 3 de la Charte de l’environnement selon lequel « Toute personne doit, dans les conditions définies par la loi, prévenir les atteintes qu’elle est susceptible de porter à l’environnement ou, à défaut, en limiter les conséquences ».

 

Malgré les incidences particulièrement négatives relevées sur les milieux écologiques, les mesures ERC étaient insuffisamment décrites et précisées par le porteur de projet, la société SCCV City dev 23.

Ainsi, le Tribunal administratif de Caen a notamment estimé qu’« il ressort des termes mêmes de l’évaluation environnementale de la déclaration de projet en litige que, tout en rappelant la nécessité de protection des zones humides présentes sur le site […] l’atteinte aux zones humides constitue une incidence négative majeure n’ayant pu être complètement évitée, [cela] sans faire état des mesures adoptées d’évitement ou de réduction, ou de l’impossibilité de mettre en œuvre de de telles mesures« .

L’absence d’intérêt général du projet

La procédure mise en œuvre par la CCCCF pour permettre l’implantation du projet impliquait d’en démontrer l’intérêt général, au regard notamment des objectifs économiques et sociaux (ex : création d’emplois, besoins de logements, de nouvelles infrastructures publiques, etc.). Ces objectifs doivent néanmoins être mis en balance avec l’intérêt de préservation de l’environnement et les atteintes qui y sont portées.

 

En l’occurrence les associations soutenaient que le projet ne présentait pas d’intérêts et avantages suffisants par rapport aux atteintes qu’il générait (17 Ha artificialisés, 16Ha de zone humide impactés ; atteinte à plus de 80 espèces animales et 200 espèces végétales ; consommation d’eau journalière 4 fois supérieure à la moyenne de consommation annuelle d’une personne etc.) – tout cela en vue de satisfaire les intérêts particuliers d’une clientèle privilégiée.

 

Les juges ont également censuré la délibération sur ce point estimant qu’« il résulte de l’ensemble de ces éléments que le besoin d’infrastructures touristiques de luxe n’est pas suffisamment étayé, que la création d’emplois pérennes qu’induirait le projet n’est pas établie ni la dynamisation durable du secteur d’implantation et que le projet aura un impact négatif important sur l’environnement. »

« En finir avec ces projets élitistes et d’un autre temps »

Les associations espèrent que les collectivités territoriales prendront acte de cette décision et comprendront qu’il s’agit d’en finir avec ces projets élitistes et d’un autre temps. Face aux immenses défis que nous impose la sauvegarde de notre planète, notamment l’évolution du climat, et la préservation de la biodiversité, nos associations resteront vigilantes au niveau local.