Enfouissement d’hydrocarbures, dissimulation de déchets, pollution des nappes phréatiques… Depuis dix ans l’entreprise VALGO, pourtant spécialisée dans la dépollution de sites industriels, méprise les normes et les alertes lancées par l’administration concernant les opérations menées sur l’ancienne raffinerie de PETROPLUS à Petit-Couronne (76).
France Nature Environnement (FNE) Normandie dépose plainte auprès du Parquet de Rouen en espérant que l’entreprise rende enfin des comptes devant la justice.
La reprise du site de l’ancienne raffinerie de PETROPLUS alors en liquidation judiciaire, fut une aubaine pour l’entreprise VALGO. Plus de 250 hectares de foncier disponibles en bords de Seine, à un prix dérisoire1, avec pour objectif de revendre les parcelles une fois débarrassées des anciennes installations. Deux entreprises spécialisées dans la dépollution de sites industriels étaient en concurrence pour la reprise du site. L’offre de VALGO a été retenue2.
Sa mission : dépolluer et démanteler les anciennes cuves, bâtiments, et retirer tout déchet industriel incompatible avec l’usage futur du site (de type tertiaire, bureaux et entrepôts logistiques).
Le coût et la complexité des opérations ont notamment justifié l’octroi de plusieurs millions d’euros de subventions (ADEME, FNADT3 et BPI). En 2015 VALGO cédait déjà pour 12 millions d’euros une partie du site au groupe Bolloré et plusieurs autres parcelles étaient vendues entre 2022 et 2023 pour plus de 10 millions d’euros.
Présentant néanmoins des risques et dangers pour l’environnement, ces activités sont strictement encadrées par plusieurs dispositions légales et arrêtés préfectoraux4. Sont notamment fixées les modalités de gestion des déchets – en particulier hydrocarburés – censés être extraits puis envoyés vers des filières de retraitement spécialisées. Quant aux apports extérieurs pour les opérations de remblaiement, ils devaient être exclusifs de matières dangereuses et strictement contrôlés à l’entrée sur le site.
Or dès 2014, les écarts réglementaires majeurs se sont enchaînés.
Depuis le début des activités de démantèlement l’entreprise accumule les graves manquements, créant des situations à risques tant pour les ouvriers du site que pour l’environnement.
Pour ne citer que les plus récents, entre 2018 et jusqu’à aujourd’hui, VALGO aurait enfoui des tonnes d’hydrocarbures issus des anciennes cuves au lieu de les évacuer comme elle y était pourtant tenue. Depuis 2016, ce sont 4000 tonnes de laine minérale qui ont été dissimulés sur une parcelle devant accueillir un espace boisé classé. L’entreprise a par ailleurs accepté de recevoir des terres chargées en plomb et en pyrite (ces dernières issues du chantier du Grand Paris express) devant servir au remblaiement de certaines zones du site – sans vérifier au préalable que les concentrations respectaient les seuils règlementaires. Des analyses effectuées entre 2019 et 2022 ont ainsi révélées que la nappe phréatique située sous le site était largement contaminée par les apports de terres pyriteuses.
Mise en demeure de régulariser sa situation à 4 reprises entre 2021 et 20245, l’entreprise a également écopée de lourdes sanctions administratives. L’administration a déjà infligé à VALGO 135 000 euros d’amende administrative et plus de 900 000 euros d’astreinte pour ne pas avoir respecté ces différentes mises en demeure.
Cela n’a semble-t-il toujours pas suffit à l’entreprise, puisque le 5 novembre dernier, le Préfet de Seine Maritime prenait un arrêté de mise en demeure et sanctionnait à nouveau VALGO d’une amende de 60 000 euros suite à un nouveau constat d’enfouissement de terres chargées en hydrocarbures6.
Malgré le travail exemplaire du service des installations classées de la DREAL7, l’entreprise manifeste un comportement particulièrement hostile vis-à-vis de l’autorité administrative et ce malgré les amendes et astreintes prononcées à son encontre.
Cette affaire mérite désormais toute l’attention des magistrats du Pôle régional environnement du Tribunal judiciaire de Rouen, créé en 2021 pour répondre spécifiquement à ce type de situations.
Face à ces constats et s’étant notamment donnée pour mission de lutter contre les manquements des industriels et les atteintes aux milieux naturels, France Nature Environnement Normandie a décidé de déposer plainte.
Nous comptons désormais sur l’autorité judiciaire pour que VALGO rende enfin des comptes devant la justice.